lundi 1 juin 2009

«Une question de vie ou de mort» pour l'ADQ

Article de Robert Dutrizac, Le devoir

Le successeur de Mario Dumont sera choisi dès octobre


Québec -- L'Action démocratique du Québec est sortie ragaillardie, hier, de son premier conseil général depuis sa déconfiture électorale. Mais les défis demeurent colossaux, et la course à la direction du parti est une question de vie ou de mort pour la formation politique.

Quelque 350 adéquistes ont décidé, hier, de devancer l'élection du prochain chef de l'ADQ. Le successeur de Mario Dumont sera désigné le 18 octobre prochain alors que le comité exécutif avait statué que les résultats seraient dévoilés lors d'une assemblée générale le 7 février 2010. Les trois candidats qui se sont manifestés à ce jour -- Éric Caire, Christian Lévesque et Gilles Taillon -- étaient tous en faveur d'une course qui ne s'éternise pas.

La course au leadership, «c'est une question de vie ou de mort» pour le parti, estime Gilles Taillon. «Avec une course trop longue, on aurait épuisé nos militants.»

L'ancien député de Trois-Rivières, Sébastien Proulx, a plaidé pour une course plus longue afin de donner le temps au parti de se rebâtir. Selon lui, le parti est mal en point. Il n'a ni le nombre de membres ni l'argent pour mener «une campagne nationale», a-t-il déclaré devant les militants. «Ce n'est pas un président de classe qu'on veut élire dans notre gang, c'est un chef de parti», a-t-il livré dans un point de presse. Il a comparé l'ADQ au personnage de film Rocky après une dégelée. «Rocky peut se relever la bouche toute croche, finir le combat et gagner. Nous, on est en politique, pas au cinéma.»

Mais l'argument présenté par le père fondateur de l'ADQ, Jean Allaire, en a rallié plusieurs. Rappelant qu'il avait vécu plusieurs départs de chef politique -- Georges-Émile Laplame, Jean Lesage, Robert Bourassa et Claude Ryan --, M. Allaire a fait valoir qu'il y avait un «flottement» néfaste pour un parti qui est privé d'un chef permanent.

Selon les règlements modifiés hier, la période de mise en candidature prendra fin le 18 août, et la campagne se terminera le 16 octobre. Le vote se fera par téléphone pendant trois jours. Numéros d'identification personnels, recoupement avec la liste électorale des adresses et des numéros de téléphone permettront d'éviter les bavures, a assuré le président de l'ADQ, Mario Charpentier. Les candidats pourront dépenser un maximum de 300 000 $ pour leur campagne. Gilles Taillon a indiqué qu'il dépenserait bien moins. Éric Caire s'attend à dépenser entre 50 000 $ et 100 000 $.

Hier, Mario Charpentier qualifiait le conseil général de «succès organisationnel». Il a indiqué que le parti comptait 12 000 membres et qu'il était «encore plus structuré qu'en 2008».

«Il ne se faut pas se le cacher: c'était un test qu'on s'est donné en fin de semaine. Est-ce qu'on est capable de tenir un conseil général qui soit une réussite? Et ça l'a été», juge le député de Chauveau, Gérard Deltell, qui a joué le rôle de président d'honneur de l'événement en raison de sa présumée neutralité relativement à la course à la succession de Mario Dumont.

Jusqu'ici, Gérard Deltell jurait qu'il ne serait pas candidat. Or devant la «pression» qui s'exerce sur lui, le député devrait annoncer cette semaine qu'il fera le saut.

Samedi matin, Gérard Deltell a livré un discours passionné qui a galvanisé les troupes adéquistes. À côté de cela, les allocutions prononcées aujourd'hui par les trois candidats en lice sont apparues bien ternes. «Dans une salle, après un discours de Gérard, les gens veulent voter pour lui», a expliqué le député de Beauce-Nord, Janvier Grondin, qui le pousse dans le dos. «Les gens de la Beauce seront derrière lui», a-t-il prédit.

De passage en fin d'après-midi samedi, Mario Dumont -- on lui réservait plus tard une soirée-hommage à l'abri des journalistes -- n'a eu que de bons mots pour Gérard Deltell. Il a salué son talent. «C'est un communicateur naturel qui connaît bien les enjeux politiques», a déclaré l'ancien chef. C'est bien davantage que ce que Mario Dumont, qui ne veut pas prendre parti dans cette course, s'est permis de dire des autres candidats.

Ni Gilles Tallon, ni Éric Caire, ni Christian Lévesque ne semblaient offusqués que Gérard Deltell ait volé le spectacle.

Les militants se sont montrés studieux en fin de semaine, pointilleux même, étudiant minutieusement un document de 70 pages qui ne décrivait pas moins de 42 «valeurs» adéquistes. Le président de l'Institut économique de Montréal, Michel Kelley-Gagnon, dont la candidature à la direction était souhaitée par certains, a livré une allocution samedi, affirmant que l'ADQ devait résolument rester fidèle aux idées de droite. Un ancien président du même institut, Paul Daniel Muller, a résumé, hier, les grandes lignes des idées de l'ADQ et son combat contre la «République des bien-pensants».

Gilles Taillon s'est inscrit en faux contre la prétention de son «ami» Michel Kelley-Gagnon. «Je croyais en 2007 -- j'étais un peu naïf -- que les idées pouvaient tout vaincre. On a fait un bout, mais il manquait quelque chose; il manquait une solide organisation sur le terrain, un bon financement», estime Gilles Taillon que les déboires électoraux ont rendu plus terre à terre.

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